Couché dans l'herbe pâle et froide de l'exile,
Sous les ifs et les pins qu'argente le grésil,
Ou bien errant, semblable aux formes que suscite
Le rêve, par l'horreur du paysage scythe,
Tandis qu'autour, pasteurs de troupeaux fabuleux,
S'effarouchent les blancs barbares aux yeux bleus,
Le poète de l'Art d'Aimer, le tendre Ovide
Embrasse l'horizon d'un long regard avide
Et contemple la mer immense tristement.
Le cheveu poussée rare et gris que le tourment
Des bises va se mêlant sur le front qui se plisse,
L'habit troué livrant la chair au froid, complice,
Sous l'aigreur du sourcil tordu l'oeil terne et las,
La barbe épaisse, inculte, presque blanche, hélas !
Tous ces témoins qu'il faut d'un deuil expiatoire
Disent une sinistre et lamentable histoire
D'amour excessif, d'âpre envie et de fureur
Et quelque responsabilité de l'empereur.
Ovide morne pense à Rome, et puis encore
A Rome que sa gloire illusoire décore.
Or Jésus ! Vous m'avez justement obscurci;
Mais n'étant pas ovide, au moins je suis ceci.